• Attention, ceci est un billet susceptible de traumatiser durablement les âmes sensibles

    J'aurais tout aussi bien pu intituler cet article "Attention, billet au contenu potentiellement choquant".
    Vous êtes prévenus !
    Ne venez pas vous plaindre ensuite .

    Paysage avec un arbre solitaire

    Venons-en à ce fameux jour du jeudi 12 janvier. (j'entends des « ooooooohhhh ! » au fond de la salle. Taisez-vous. C'est moi qui raconte)

    Dans un amphi, nous sommes 4 filles : il y a I., E., C. et moi sur les premiers rangs.

    On en vient à discuter et je remarque qu'I., qui est  côté de moi, a posé un sac plastique par terre, avec des trucs dedans.
    Je lui demande ce qu'il y a dedans (moi pas tilter...), ce n'est pas dans ses habitudes de se trimballer avec un sac en plastique tout moche.
    Elle me répond que n'ayant pas eu de cours entre je ne sais pas quelle heure et maintenant, elle est allée faire les soldes. Ok.

    Sur ce, celles de derrière (de mon groupe toujours) E. et C. enchaînent sur les soldes qui viennent juste de commencer.

    Pour me titiller, C. me fait « Et toi Anne, que vas-tu donc t'acheter pour ces soldes mmh ? » (elle est un peu au courant que la réponse sera sans doute du style « rien » ou « pas grand chose »).

    - Bah, rien de spécial, j'ai pas envie de dépenser. [yeux interrogateurs de ma voisine I.] De toute manière, je suis très radine.
    [j'aurais bien dit économe, mais c'est pas assez percutant pour les jeunes d'aujourd'hui mes camarades]

    - (I., ne comprenant pas bien) Mais, euh, radine-radine ? comment ça, mais, comment c'est possible ?
    [c'est dire...]

    - Bah, je n'aime pas dépenser mes sous. Je préfère économiser. Faire faire des petits sous à mes sous quoi.

    - Hein ? Mais moi, si j'ai 50 € et que je les mets à la banque, c'est comme si je les perdais quoi !
    [moi c'est le contraire : si je les mets sur mon compte, je peux les admirer (oui, ça se fait par internet) alors que si je les dépense, bah, c'est fini, ils sont plus à moi . C'est pourtant un raisonnement basique ]

    - (I.) Mais enfin, tu n'as pas de, de "plaisir" à acheter des trucs qui te plaisent ? à te promener dans les magasins et tout ça ?
    [malheureusement pour elle, je crois être insensible à ce genre de choses]

    - Non, même pas. De toute manière, j'aime pas faire les magasins.

    Et là, je vous raconte pas. J'aurais presque pu avoir peur.

    Il y avait deux têtes qui me dévisageait, I. et E., avec les yeux tellement écarquillés (ou ahuris, tous les synonymes que vous voulez...) que j'ai cru qu'ils allaient tomber de leurs orbites comme des petites billes, et rouler jusqu'en bas de l'amphi (si, si).
    (même qu'après, je les aurais même gardés pour les transformer en perles, comme dans le Prince du Pacifique, et je les aurais vendus hihi ).

    - (I.) Mais enfin, tu n'aimes même pas entrer dans les magasins, et regarder les vêtements, même juste pour le plaisir des yeux ?
    [dans ma tête : mais enfin, qu'est-ce qu'elle me raconte, c'est quoi ce gros délire ??!??]
    [et elle dit ça presque d'une manière implorante ; je sens que pour elle, je suis Perdue ]

    - Euh, non.

    Et là, elles étaient carrément choquées, comme si j'avais proféré une énormité (j'exagère à peine). J'ai eu le droit à plusieurs « Oh là là, mais t'es grave Anne !... » (il paraît que ça se dit, enfin, du moins, j'y ai eu le droit plusieurs fois depuis le début de l'année ).
    Elles n'ont juste pas compris. Enfin, je ne leur demande même pas de comprendre, juste de ne pas trouver ça aussi bizarre. Parce qu'après tout, elles, elles ont parfaitement le droit d'aimer faire les boutiques, ok, et puis il y a des gens qui n'aiment pas ça (aussi).

    D'ailleurs, rappelez-vous les filles, quand vous étiez en train de faire les boutiques dans la galerie marchande du Leclerc ! En attendant notre séance de cinéma, au premier jour des vacances de Noël, moi, j'étais avec deux autres étudiants, partie à l'espace culturel du Leclerc ! Pendant que vous regardiez les vitrines, tout ça pour ne rien acheter (n'est-ce pas vous faire du mal en plus ?).

    Alors que ce que, moi, je trouve bizarre, ce n'est pas tellement le fait qu'elles, elles aiment claquer leurs sous (enfin, plutôt celui de leurs parents dans leurs cas  !), ça les regarde, c'est plutôt le fait que si j'avais été un garçon, ça ne leur aurait très certainement aucunement fait cet effet. J'en suis sûre et certaine. Ça ne les aurait pas interpellées plus que ça.
    (C'est dire comme certaines personnes sont formatées pour trouver des différences filles-garçons presque normales, hein...)

    Alors () il faut savoir qu'à titre personnel, je me définit simplement comme économe. 
    Je fais mes courses pour globalement 20 € par semaine tout compris, nourriture et matériel de travail (oui, mais il faut compter le RU en plus et la boulangerie) et je m'en tiens là (sauf circonstances qu'on pourrait qualifier d'exceptionnelle - comme le fait d'être en manque de pyjama - qui est un problème réglé ).
    Bizarrement, le truc qui me fait le moins mal , c'est mon loyer. Faut dire que pour éviter de se faire trop de mal, vaut mieux voir ça comme une investissement sur un mois. Psychologiquement, pour moi, c'est moins douloureux comme ça.

    Par contre, même le lendemain, les filles (surtout E.) n'en étaient pas remises.
    On a déjeuné au RU.
    E. disait bien que son père était radin, mais « pas comme ça » (comprendre : à ce point là). Bah écoute, ça le regarde hein !
    Il y a quelques temps, elle nous avait raconté que son père avait attendu le mois de novembre pour allumer le chauffage dans leur maison.

    E. : « Tu sais, à chaque fois qu'on fait tomber un peu de nourriture par terre, y'a mon père qui soupire "Encore cinq centimes de perdus !" ».
    Bon. Moi quand je fais tomber un truc par terre, je le mange (bon, si c'est par terre chez moi, et pas à l'endroit où je pose ma poubelle et mes godasses, ou même quand je suis pas chez moi. Il y a des limites à l'hygiène !).
    Shocking quand même apparemment.
    Tandis qu'E. disait que tout le monde rèverait que le monde ne soit presque que boutiques (ou quelque chose comme ça, mais en un peu moins excessif), moi je disais que le plus chouette ce serait un monde de librairies et de bibliothèques, et que je ne m'habillais qu'en soldes (je ne sais même pas comment on en est arrivées là d'ailleurs).
    D'ailleurs, ce que je porte ce soir en écrivant ce billet, à part mes chaussettes, c'est du 100 % soldes.

    Je crois que le paroxysme a été atteint juste à la fin du repas, peu avant qu'on s'en aille.
    Moi, je regardais la dosette de sauce à salade, qu'E. avait laissée sur le bord de son plateau.
    Je me suis - juste - contenté de récupérer la dosette.
    Dans son propre plateau certes, mais on était sur le point de s'en aller et elle n'allait pas s'en servir ni la rapporter chez elle.
    Ça l'a encore plus traumatisée de voir que j'étais à l'affût des dosettes de sauce à salade et de mayonnaise inutilisées dans les plateaux de mes voisines de table.
    (mais ça m'évite de m'acheter de la mayonnaise...).

    Pendant que j'y pense, faudra que je songe à récupérer des dosettes de poivre.
    J'en ai pas chez moi, mais pour mettre dans la sauce à salade, ce serait pas mal, et ça m'éviterait d'en acheter .
    (mais bon, je me suis fait une raison : ma sauce à salade ne sera jamais aussi bonne que celle de ma mamie, donc en même temps, est-ce que ça en vaut vraiment la peine ...)

     

    Je me demande comment on élève certaines filles dans ce bas-monde pour qu'une de leurs principales occupations soit dédiée à des choses aussi futiles que la consommation de biens éphèmères, typiques d'une société déjà ouvertement consumériste. Pardon, faut pas juger les gens c'est mal... (mais des fois ça fait du bien !)

    Sur ce, bonne nuit à tous, que vous aimiez faire les boutiques (ou pas !) !

     

    PS : ah si, à la rigueur, mes magasins préférés, c'est Décathlon et Picard.

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