• Ma comédie du genre

    Pas en état de mettre avertissement, préambule, et multiples annotations additionnelles.
    Cf. entre autres tags en fin d'article
    [1].

     

    S'identifier à un genre[2], n'est-ce pas s'identifier (ou ne pas s'identifier) partiellement ou totalement à des stéréotypes et caractéristiques qui ont été accolés à un sexe / genre[3] par la société au fil des siècles ?
    S'identifier personnellement comme F ou H, n'est-ce pas se reconnaître dans des cases attribuées par la société à l'un ou l'autre ?

    S'identifier à un genre, n'est-il donc pas s'inscrire dans le « jeu » de la société et reconnaître que telles caractéristiques sont attribuables aux F et telles autres aux H ? n'est-ce pas perpétuer les associations de type les femmes sont comme ci et les hommes sont comme ça ? n'est-ce donc pas contribuer à perpétuer les stéréotypes de genre ? n'est-ce pas contribuer à perpétuer des construits artificiels ?

     

    Il semblerait qu'on me considère comme une fille parce que je serais née avec une vulve et (selon tout vraisemblance) un vagin[4]. J'ai sans aucun doute été élevée dans cette optique[5], même si je pense avoir cerné assez vite l'entourloupe. Et le fait qu'à cause des autres, être considérée F me fait perdre au change[6]. Dommage pour un construit social débile.
    Pourtant.

    Je me genre au féminin uniquement parce que j’ai
    appris que sinon, c'était une faute de grammaire.
    Et je déteste faire des erreurs.

    J'ai les cheveux longs parce que c'est tout doux, et surtout,
    ça me permet de les tripoter et d'occuper mes mains - comme
    malaxer les tissus des tee-shirts ou de mon lit.

    Je porte certains bracelets quotidiennement uniquement
    pour la symbolique que je leur attribue et que j’ai besoin
    d’avoir avec moi. En vrai, je trouve ça moche et je
    déteste me sentir serrée par quoi que ce soit.

    Je porte des lunettes de rayon femmes parce que les lunettes qui
    me plaisaient vraiment étaient toutes au rayon homme et avaient
    des branches trop longues qui dépassaient de l'arrière de ma tête.

    Je porte un soutien-gorge parce que ça me permet de plaquer
    ces deux glandes molles contre mon corps pour essayer de me
    les faire oublier, principalement parce qu'aujourd'hui, avoir de
    la poitrine aussi petite soit-elle est une autorisation
    contre son gré à se faire observer et prédater[7].

    Je m’habille avec des vêtements étiquetés femme parce que je suis
    trop petite pour me vêtir uniquement avec les vêtements sobres du
    rayon homme, et qu’on m’a inculqué d’essayer de pas me fagotter
    comme une enfant sans mère (je pense avoir failli sur ce point).
    Pourtant, je préfère largement porter des tee-shirts étiquetés
    masculins car je suis plus à l'aise dedans, qu'ils sont moins taillés
    bizarrement, plus sobres et surtout plus doux.

    J’adore les animaux, mais pas pour les materner.
     Je les aime surtout quand faut leur ouvrir le ventre
    ou leur retirer des organes[8].
    J’aime quand ça saigne, quand ça pue et quand ça explose.
    Le 24 décembre 2015, j’ai mis dans un sac d’incinération un
    chat frappé par une voiture dont l’œil était sorti de son orbite.
    C'était cool, et cet oeil, je l’ai vu comme une boule de Noël. Fête.
    C’était mon cadeau de Noël à moi.

    Pendant une longue période, je regardais des tutoriels de
    maquillage sur internet. Pas par véritable intérêt, car je ne
    me maquille pas, ne me suis jamais maquillée et n’aime pas
    les visages maquillés[9], mais uniquement pour le côté
    purement technique de la chose.

    Quand je regarde un film, je suis toujours en train d’imaginer
    comment la scène a été tournée et quels étaient les moyens
    techniques (effets spéciaux inclus) utilisés pour arriver à ces
    résultats. Je me délecte des making-of.

    J’ai eu plusieurs poupées, pourtant je déteste les enfants depuis
    aussi loin que je m’en souvienne. Même si je pense que je pourrais
    les apprécier sous la forme de steak, avec une bonne sauce aux
    herbes et à la moutarde, si je n’étais pas végétarienne.

    ***

    À cause de mon physique et de mes organes génitaux supposés[10], on[11] me colle, comme à d’autres, des traits, des caractéristiques[12] qui n’ont rien à voir avec ce que je ressens ou ce que je suis.
    J’endosse seulement les stigmates du genre qu’on m’attribue malgré moi, pour la seule raison que physiquement je ressemble à une personne du sexe féminin, et que, dans la logique majoritaire, je devrais donc être une femme, avec tous les préjugés que ça implique - et donc, j'appartiens malgré moi à une catégorie à laquelle je ne corresponds pas.
    Alors que franchement. Ne suis-je pas bien plus que ça ?

    Je ne veux m’identifier à rien : ce serait reconnaître, valider et donner raison à la société que telles choses sont féminines et telles autres sont masculines. Et la société n’a pas raison.

    Je suis juste Nanou, une créature humaine de taille réduite qui se cherche et qui pleure actuellement beaucoup trop souvent[13], et dont le but dans la vie c’est de plonger ses mains dans des tripes fraîches[14] tout en essayant de devenir un peu moins stupide au fil du temps.

    Quand, dépasserons-nous, nous et notre société entière, cette séparation totalement artificielle entre masculin et féminin, qui ne fait qu'imposer insidieusement des limites aux gens ?

    À quand une société sans genre[15] ?
    Pour que chaque personne soit enfin totalement libre de se définir comme elle le souhaite en dehors de ce carcan inutile, sans en être pénalisée au cours de sa vie ? Pour que chaque personne puisse enfin sortir librement de la norme actuelle, sans en souffrir ni se sentir jugée ?

     

    ***

    [1] Ce billet ne concerne donc que mon « Me, myself & I » et n'a pas valeur de jugement sur autrui. Ressenti soumis à évolution.
    [2] Que l’on soit cis ou non. (c'est quoi ? lire ici)
    [3] Petit mélange car jusqu’à une période plutôt récente, les deux étaient confondus.
    [4] Communément dénommé par « assignation sexuelle ». À la naissance, il est acté qu’un bébé avec un pénis est un garçon, un bébé avec une vulve est une fille, et tant pis pour les autres.
    [5] On n’échappe pas à une éducation différenciée en fonction du sexe : http://edupass.hypotheses.org/1036
    [6] Est-il utile de renvoyer par exemple vers cet article concernant les inégalités entre hommes et femmes en France en 2017
    [7] C’est aussi fort incommodant.
    [8] À bon escient.
    [9] Dans mon monde, seule ma grand-mère se maquille.
    [10] Car oui, je ne me balade pas à poils dans la rue.
    [11] On indéfini. Sens large. Exemple : une nouvelle personne rencontrée.
    [12] Quand ce n’est pas carrément une destinée.
    [13] Mais qui arrivera un jour à pleurer en néerlandais.
    [14] Mais pour faire le Bien.
    [15] Ou sans différenciation entre genre, ou dans laquelle le genre n’aurait aucune importance.

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